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Fédération régionale de l’exercice coordonné et pluriprofessionnel en santé primaire de Nouvelle-Aquitaine. Fondée en 2008 et composée de professionnels de santé qui interviennent pour accompagner le développement et promouvoir ce “nouveau” mode d’exercice. 

Loi infirmière adoptée: un tournant pour cette profession, mais aussi pour l’accès aux soins et l’organisation pluripro

#AVEC les oreilles: Ecoutez le décryptage de ce texte et de ses évolutions en 5' ici:

Un texte pour moderniser la profession infirmière et améliorer l’accès aux soins

Face aux difficultés croissantes d’accès aux soins et au retard quant à l’actualisation des compétences des professions de santé, le Parlement a adopté ce 19/06 une réforme historique du métier d’infirmier. La proposition de loi sur la profession infirmière, déposée fin 2024 par des députés de la majorité, vise à mieux reconnaître les missions des infirmières et infirmiers et à faire évoluer leurs compétences pour répondre aux besoins de santé sur le terrain. Le cadre d’exercice actuel, seulement défini par un décret désuet de 2004, est en effet jugé obsolète au regard de la diversification du métier et du rôle central des 600 000 infirmiers en activité dans notre système de santé. Cette loi entend redéfinir le cadre législatif de la profession en inscrivant dans la loi ses missions fondamentales et en ouvrant de nouveaux espaces d’autonomie, tout en s’inscrivant dans une logique de coordination avec les autres soignants. L’objectif affiché est double : valoriser le rôle infirmier – souvent considéré comme insuffisamment reconnu et sous-utilisé – et améliorer l’accès aux soins  en permettant aux infirmiers de pratiquer davantage d’actes de premier recours. Le gouvernement a d’ailleurs engagé la procédure accélérée sur ce texte, témoignant de l’urgence à mettre en place ces mesures dès 2025.

Missions élargies et nouvelles compétences reconnues

La loi infirmière 2025 apporte plusieurs changements majeurs dans l’exercice infirmier :

  • Définition légale des missions socles : Pour la première fois, la loi va définir les missions de base des infirmiers dans le Code de la santé publique. Seront ainsi inscrits noir sur blanc des rôles tels que : dispensateur et évaluation des soins préventifs, curatifs, palliatifs ou de surveillance clinique ; contribuer à la conciliation médicamenteuse aux côtés des autres professionnels (pour harmoniser les traitements d’un patient) ; orienter les patients et coordonner leur parcours de soins ; participer aux soins de premier recours, à la prévention et au dépistage ; contribuer à la formation des étudiants et des couples ; et prendre part à la recherche en sciences infirmières. Cette consécration législative du « rôle propre » infirmier était très attendue par la profession, qui y voit une reconnaissance officielle de son « art infirmier » et de son rôle pivot dans le système de santé. Les actes et domaines d’activité précis continueront d’être détaillés par voie réglementaire (décrets et arrêtés) afin d’encadrer les compétences techniques.

  • Consultation et diagnostic  : Le texte consacre deux notions jusqu’ici absentes de la loi : la consultation infirmière et le diagnostic infirmier.  Ces pratiques existaient déjà dans les faits (par exemple, les consultations infirmières à l’hôpital ou le concept de diagnostic infirmier reconnu dans le décret depuis 1993), mais elles obtiennent un fondement légal. La consultation infirmière permettra à un infirmier de recevoir un patient de manière autonome pour des motifs pertinents de son rôle propre – par exemple le suivi d’une plaie simple – sans empiéter sur la consultation médicale qui demeure du ressort du médecin. De son côté, le diagnostic infirmier formalise l’évaluation clinique autonome qui pose l’infirmier sur la situation du patient, en complément du diagnostic médical. Ces avancées symboliques renforcent la légitimité du jugement clinique infirmier dans la prise en charge.

  • Droit de prescription étendu : Les infirmiers bénéficient d’un pouvoir de prescription élargi , encadré par la loi. Désormais, l’infirmier pourra prescrire de façon autonome certains produits de santé et examens nécessaires complémentaires aux soins infirmiers, sans passer par un médecin. Concrètement, une liste précise de médicaments, dispositifs médicaux et examens autorisés sera établie par arrêté ministériel, après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine, et mise à jour régulièrement. Jusqu’à présent, chaque nouveau droit de prescription (vaccins, substituts nicotiniques, etc.) nécessitait une modification législative ponctuelle ; la loi crée un cadre général qui fera gagner en souplesse. Cette autonomie de prescription reste limitée aux besoins pertinents du soin infirmier et s’inscrit dans un exercice coordonné, afin de ne pas créer de confusion avec l’activité médicale. D’ailleurs, le législateur insiste sur la coordination : les soins prescrits par l’infirmier devront être tracés et communiqués au médecin traitant via le dossier médical partagé, pour garantir le suivi du patient.

  • Nouvelles reconnaissances professionnelles : Le texte apporte également une reconnaissance statutaire attendue à certains rôles infirmiers. Les infirmiers de l’éducation nationale (infirmiers scolaires et universitaires) seront reconnus comme une spécialité infirmière autonome de niveau master (niveau 7) , avec la possibilité d’un diplôme spécifique. Cette mesure consacre le rôle pivot des infirmiers scolaires dans la communauté éducative et sanitaire. De même, la fonction d’ infirmier coordonnateur en EHPAD (maisons de retraite médicalisées) est formellement définie et inscrite dans la loi. L’infirmier coordonnateur travaillera en collaboration avec le médecin coordonnateur et l’équipe soignante, soulignant l’importance de la coordination pluridisciplinaire dans ces établissements. Ces reconnaissances permettent de mieux encadrer et valoriser des postes clés pour la coordination ville-hôpital (par exemple, l’infirmier en EHPAD facilitant le lien avec les services hospitaliers, ou l’infirmier scolaire orientant vers les structures de soins) et pour la prévention en population (rôle des infirmiers scolaires en matière d’éducation à la santé).

Accès direct expérimental et extension de la pratique avancée

Expérimentation de l’accès direct aux soins infirmiers : L’une des dispositions phares est la mise en place d’une expérimentation, sur 3 ans, de l’accès direct à un infirmier sans passer par un médecin. Concrètement, dans cinq départements pilotes , les patients pourront consulter directement un infirmier – que ce soit à l’hôpital, en établissement médico-social, en maison ou centre de santé… – sans ordonnance médicale préalable , et bénéficier d’un remboursement par l’Assurance maladie. Cet accès direct ne concernera que des actes hors rôle propre habituellement soumis à prescription médicale, et il se fera dans le cadre d’un exercice coordonné en MSP, pour maintenir le lien avec l’équipe soignante du patient. Un compte-rendu de l’infirmier devra d’ailleurs être précisé au médecin traitant et consigné dans le dossier médical partagé afin d’assurer le suivi. L’idée est de  permettre aux infirmiers de prendre en charge directement certaines demandes de premier recours (soins infirmiers typiques, suivi de maladies chroniques stabilisées, éducation thérapeutique…). Cette mesure, très attendue par les représentants des patients, vise à prouver sur le terrain l’efficacité d’un recours élargi aux infirmiers pour améliorer l’accès aux soins. À l’issue de l’expérimentation, une évaluation permettra de juger de son extension éventuelle à l’ensemble du territoire.

Évolution de la pratique avancée infirmière (IPA) : La réforme compte également sur les infirmiers en pratique avancée (IPA) pour renforcer l’offre de soins. Les IPA, créés en 2018, sont des infirmiers titulaires d’un diplôme de master qui exercent avec un niveau de compétences élargi (examens cliniques, prescriptions limitées de médicaments, renouvellement d’ordonnances, etc.) en collaboration avec les médecins. La loi va élargir leurs domaines d’intervention en autorisant les IPA à exercer dans de nouveaux secteurs où leurs compétences seront utiles : services de PMI (protection maternelle et infantile), santé scolaire, aide sociale à l’enfance (ASE) et établissements d’accueil du jeune enfant. Jusqu’ici, les IPA étaient surtout déployés en soins primaires, en établissements de santé ou en pratique libérale dans des domaines ciblés (parcours chroniques, oncologie, etc.) ; leur champ d’action va donc s’étendre à la pédiatrie communautaire et à la prévention en matière de santé infantile, comblant là aussi des besoins dans ces structures de proximité. Par ailleurs, les infirmiers déjà spécialisés (comme les infirmiers anesthésistes, de bloc opératoire ou puéricultrices) pourront eux aussi accéder à des fonctions de pratique avancée tout en conservant leur spécialité. Autrement dit, un infirmier anesthésiste diplômé d’État (IADE) pourrait développer une pratique avancée en anesthésie/réanimation, ou une puéricultrice en PMI pourrait devenir IPA en santé infantile. Cette possibilité devra néanmoins être encadrée par décret et exclura l’accès direct pour ces infirmiers de spécialité, afin de ne pas créer de chevauchement avec les IPA généralistes ou le rôle médical. Le Sénat a en effet tenu à préserver la place des IPA déjà en poste en conditionnant l’extension de la pratique avancée aux spécialistes pour ne pas « fragiliser la fonction d’IPA » existante. Quoi qu’il en soit, l’ensemble de ces mesures sur la pratique avancée vise à mieux utiliser les compétences expertes des infirmiers pour répondre aux besoins de la population, en particulier dans la prévention et la gestion des maladies chroniques, sans casser les équilibres actuels entre professions.

Débats au Parlement : coopération, périmètre et tensions interprofessionnelles

Le parcours parlementaire de cette loi infirmière a révélé des enjeux de coopération entre professionnels de santé et a suscité des débats sur le périmètre exact des nouvelles prérogatives des infirmiers. Globalement, le texte a fait l’objet d’un large consensus politique  : il a été adopté à l’unanimité en première lecture par l’Assemblée nationale le 10 mars 2025, puis de même au Sénat le 5 mai 2025. Cependant, plusieurs points sensibles ont été discutés :

  • Coordination avec les médecins : Les syndicats de médecins et certains parlementaires ont initialement exprimé des réserves quant à l’extension du rôle infirmier , notamment sur le droit de prescription autonome, y voyant une façon indirecte de pallier le manque de médecins dans les territoires. Pour apaiser ces inquiétudes, le gouvernement et les rapporteurs ont insisté sur le fait qu’« il n’est pas question d’ouvrir un front avec les médecins » : les nouvelles missions infirmières s’exerceront en coopération et en complémentarité avec les médecins, sans empiéter sur le champ médical. Le Sénat a d’ailleurs tenu à renforcer ce principe dans le texte en précisant que l’exercice infirmier se fait « en coordination » avec l’ensemble des professionnels de santé , préférant ce terme à celui de « complémentarité » choisi initialement par l’Assemblée. Cette terminologie souligne la place primordiale des MSP dans le premier recours et la volonté d’intégrer pleinement les infirmiers dans le travail d’équipe, tout en reconnaissant leur autonomie dans leur champ propre. De même, les sénateurs ont ajouté la saisine de l’Académie de médecine pour avis sur la liste des prescriptions infirmières afin d’associer l’expertise médicale à la mise en œuvre de cette mesure. Ces ajustements visent à prévenir les tensions interprofessionnelles en encadrant l’autonomie infirmière par des garde-fous collaborateurs.

  • Amendements retirés et ajustements : Durant les discussions, de nombreux amendements ont été déposés, certains pour élargir encore le texte, d’autres au contraire pour restreindre certaines libertés accordées. Par exemple, des propositions visaient à re-subordonner des compétences propres des infirmiers à une prescription médicale ou à l’avis du Conseil de l’Ordre des médecins, ce que les représentants infirmiers ont décrété comme des tentatives de retour en arrière. Sous la pression des organisations infirmières (Ordre, syndicats), ces amendements jugés « ubuesques » ont été retirés en commission, entraînant de vider la réforme de sa substance. À l’inverse, certains amendements sans lien direct avec le texte – bien qu’abordant des problèmes réels du métier infirmier, tels que les conditions de travail ou la rémunération – ont été écartés pour ne pas « polluer » le débat centré sur la reconnaissance du rôle infirmier. Le Sénat a apporté plusieurs modifications constructives, par exemple en reconnaissant officiellement l’infirmier de bloc opératoire, l’infirmier anesthésiste ou la puéricultrice comme des infirmiers de spécialité pouvant évoluer en pratique avancée (mais sans accès direct) afin de dissiper l’ambiguïté du texte initial qui semblait fusionner spécialités et IPA. De même, il a rappelé que les IPA en établissement scolaire exerceront « en lien avec un médecin » , alignant cette pratique sur les autres secteurs d’activité des IPA. Enfin, sur la question de la rémunération des infirmiers , plusieurs parlementaires ont alerté le gouvernement sur la nécessité d’une revalorisation salariale, compte tenu de la pénibilité du métier et de l’élargissement des missions. En réponse, l’exécutif s’est engagé à ouvrir rapidement des négociations conventionnelles pour traduire les avancées de la loi en termes de rémunération. Cette promesse a été concrétisée par l’envoi, fin mai, d’une lettre de cadrage à l’Assurance maladie afin d’entamer des discussions avant l’été 2025. L’ensemble de ces débats montre une volonté partagée de moderniser le métier infirmier tout en maintenant un équilibre avec les autres professions de santé , équilibre qui a fait l’objet d’une vigilance particulière tout au long du processus législatif.

 

Calendrier d’adoption et d’entrée en vigueur

Le chemin législatif de la loi infirmière touche à sa fin en cette mi-2025. Après son adoption définitive attendue au Sénat le 19 juin 2025 (suite à l’accord trouvé en commission mixte paritaire le 3 juin), le texte pourra être promulgué par le Président de la République dans les jours qui suivront. Le gouvernement a indiqué vouloir aller vite : les ministres en charge de la Santé ont d’ores et déjà préparé les textes réglementaires nécessaires afin que les premières mesures entrent en vigueur dès la publication de la loi – possiblement dès l’été 2025 pour les dispositions ne nécessitant pas de décret complexe.

Concrètement, la reconnaissance des missions et des nouveaux rôles infirmiers sera effective dès l’inscription de la loi au Journal Officiel. En revanche, certaines avancées exigeront des étapes complémentaires : par exemple, la liste des prescriptions infirmières devra faire l’objet d’un arrêté ministériel (après avis de la HAS et de l’Académie de médecine) avant que les infirmiers puissent effectivement débuter ces prescriptions. De même, le lancement de l’ expérimentation d’accès direct dépendra d’un décret précisant les modalités de sélection des 5 départements pilotes et le cahier des charges de l’évaluation. Ce décret d’application pourrait paraître à l’automne 2025, pour un démarrage des expérimentations début 2026 au plus tard. En parallèle, la négociation conventionnelle entre l’Assurance maladie et les syndicats infirmiers devrait s’ouvrir durant l’été 2025, afin de créer de nouveaux actes cotés (consultation infirmière, téléconsultation infirmière, etc.) et de réviser les tarifs existants en tenant compte de la pénibilité et des nouvelles missions. L’objectif affiché par le ministère est de finaliser ces négociations d’ici fin 2025, de sorte que les infirmiers puissent bénéficier d’une revalorisation et d’un cadre de rémunération adapté concomitamment à l’élargissement de leur champ d’action.

Enfin, pour ce qui est des formations et de l’adaptation du cursus, le ministère de la Santé et celui de l’Enseignement supérieur travaillent de concert avec les instituts de formation en soins infirmiers (IFSI) et les universités. L’inscription des missions dans la loi devrait entraîner une mise à jour des référentiels de formation infirmière afin d’intégrer les notions de diagnostic infirmier, de consultation, et les compétences propres élargies. Par ailleurs, la création de la spécialité « infirmier en santé scolaire » au niveau master impliquera de définir un nouveau diplôme ou une formation complémentaire pour les infirmiers souhaitant se spécialiser dans ce domaine. Ces chantiers seront menés dans les mois qui viennent, en parallèle de l’entrée en vigueur de la loi.

La loi infirmière de 2025 s’annonce comme un véritable tournant pour l’accès aux soins en France. Portée par un large consensus politique et soutenu par les professionnels de santé comme par les patients, elle apporte des réponses concrètes aux enjeux actuels d’accès aux soins. Les infirmiers, grâce à une meilleure reconnaissance de leurs compétences et de nouvelles attributions, seront en mesure de jouer un rôle accumulé dans la prise en charge des patients au sein des MSP, tout en travaillant main dans la main avec les autres acteurs du système de santé. 

Reste désormais à traduire rapidement ces avancées dans la pratique quotidienne : la balle est dans le camp des pouvoirs publics pour publier les décrets attendus et financer ces évolutions, afin que cette réforme ambitieuse se transforme en bénéfices réels pour les soignants comme pour les patients sur l’ensemble du territoire.

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